Lexique identitaire

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GOTHIQUE (ART)

Malgré la prépondérance écrasante de l'art roman (et davantage encore dans les esprits que dans la réalité) le legs gothique est loin d'être négligeable en Auvergne. Il est maintenant bien connu grâce à l'ouvrage monumental d'A. Courtillé : Auvergne et Bourbonnais gothiques, I Les débuts, 1990, II L'apogée, 1992, éd. CREER, Nonette . Dans un premier temps (de 1150 à 1250), les procédés gothiques s'introduisent dans les édifices existants, ils les complètent ou les transforment partiellement. Comme il est normal, puisqu'ils sont propagés par la métropole de Bourges et passent surtout par la Bourgogne, ils se répandent surtout en Bourbonnais et dans le Nord de la Basse-Auvergne, principalement la Grande Limagne et ses bordures. Cependant, les églises touchées par cette mode s'égaillent aussi en assez grand nombre à travers les Limagnes du Sud jusqu'en Brivadois et en petite quantité sur les plateaux de l'ouest jusqu'au massif du Sancy. Le bassin de la Dore, le Sud-Ouest de l'Auvergne et le Velay ne sont pratiquement pas atteints. Il est clair que cette répartition trahit le renversement débutant du système de relations en direction du puissant foyer de développement économique et d'innovation culturelle du Bassin Parisien central. Mme Courtillé souligne que l'Auvergne n'a pas copié platement, mais qu'elle a su trouver les moyens d'intégrer les nouvelles façons de bâtir et d'orner dans ses traditions et les adapter à la fois aux matériaux - moins faciles à travailler que les calcaires septentrionaux - et à son goût invétéré de la sobriété. Dans une seconde phase, qui commence avec le chantier de la cathédrale de Clermont (1250), monument majeur du gothique dans la région - mais qui selon cette spécialiste ne fit pas la meilleure propagande du fait de sa durée -, l'art gothique progresse dans la même ligne : par une sorte de réfection interne des édifices nouveaux, par leurs adjonctions et par une extension géographique. La première filière se rencontre un peu partout. La seconde concerne surtout l'Est auvergnat, bassin de la Dore et plateau de la Chaise-Dieu. Son ampleur est accrue par les événements de la guerre de Cent Ans : l'Est auvergnat, proche des axes de la Loire, de la Saône et du Rhône parcourus sans relâche par des bandes de soudards destructeurs, a subi beaucoup plus de dégâts que le reste de la province. Il y a d'ailleurs une parenté évidente entre les églises de l'Ambertois et celles du Forez et du Lyonnais. Le granite dur ne se prête pas aux bâtiments ajourés et le mauvais souvenir des exactions pousse à construire très solidement. D'où l'aspect massif de beaucoup de ces églises, qui adoptent d'ailleurs un certain nombre de traits du style gothique du bassin rhodanien et du Sud-Est de la France dits "gothique méridional". Cela aussi est en accord avec d'autres données : les relations rhodaniennes sont restées très actives dans l'Auvergne orientale jusqu'au milieu du XIX° siècle. On en a un témoignage scientifique dans F. Imberdis (Le réseau routier de l'Auvergne au XVIII° siècle, Paris, PUF 1967) et littéraire dans Gaspard des Montagnes d'Henri Pourrat dont le héros s'occupe de roulage entre le pays d'Ambert et la vallée du Rhône.
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