Lexique identitaire

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CONSONNES FINALES

  La chute généralisée - ou du moins très étendues dans les parlers les plus conservateurs - des consonnes finales est une caractéristique fondamentale de la langue auvergnate, conséquence de son articulation relâchée (faible tension articulatoire). On doit envisager trois cas :
  • A la "finale absolue", c-à-d à la pause en fin de phrase ou de proposition, certaines consonnes (surtout -r; dans le Sud -s) peuvent être prononcées plus ou moins distinctement (le -r souvent comme un simple "coup de glotte").
  • A la fin des mots :
le parler ultra - conservateur des Protestants du Velay fait entendre de nombreuses consonnes finales, tout en les transformant assez souvent (-t gagne sur les autres occlusives sourdes, surtout sur -c).Les parlers "catholiques" voisins de l'Yssingelais méridional partagent ce dernier trait, tout en étant déjà nettement plus érodés.
Les parlers cantaliens transforment -l en -r (trabar, veder, peiror : travail, veau, chaudron).
Les parlers d'Auvergne médiane et méridionale gardent -s en phonétique syntactique (dans la chaîne parlée devant les mots commençant par c, ch, f, p, t) et sporadiquement -r (mais jamais à l'infinitif des verbes), consonne la plus résistante à cause de sa prononciation roulée linguale qui exige peu d'effort.
Le même -r subsiste dans quelques séries de mots en haut Livradois. Ailleurs, tout l'auvergnat septentrional élimine toutes les consonnes finales, y compris dans les mots d'emprunt. De rares parlers (plateau de haute Sioule - Dordogne) ont transformé en z- anti-hiatus l'ancien -s de l'article pluriel et des mots outils devant un mot commençant par une voyelle. Mais en général le hiatus est largement accepté et de plus en plus, malgré la pression en sens inverse de la liaison en français ou bien il est pallié par un (yod).
  • A la fin des syllabes ou plus généralement à l'intérieur des mots, l'étymologie créait des groupes de consonnes. L'auvergnat les a pratiquement tous éliminés partout. On distingue les cas suivants :
le groupe disparaît sans laisser de trace : fatürà : facture.
le groupe disparaît en laissant une vocalisation (par exemple dans les préfixes dei- et ei- remplaçant des- et es- devant consonne) ou une aspiration (par exemple dans les parlers cantaliens où le s- devantc, ch, f, p, t, maintenu parfois dans le mot isolé se réduit à (h) ou s'amuit totalement en diction courante dans la chaîne parlée.
Dans quelques cas, la première consonne disparue du groupe a maintenu sourd le son de la seconde consonne que l'auvergnat sonorise généralement entre voyelles (exemple meutou : mouton, du gaulois multo, différent de pradà : prairie de pratam). La chute de la consonne finale :
  • atteint la résonance de la voyelle semi-nasale : gro : grain; ma : mains; : il vient; vï : vin.
  • provoque l'affaiblissement de la voyelle du monosyllabe : : doigt; re : rien.
Conséquences orthographiques de la chute des consonnes finales :
  • C'est un phénomène fondamental de l'évolution auvergnate. Tout système d'écriture qui rétablit les consonnes étymologiques non prononcées enfreint l'esprit même de la langue, trompe gravement sur la prononciation, tend à aligner l'auvergnat sur d'autre idiomes qui évoluent indépendamment de lui, crée des rébus indéchiffrables à ceux qui veulent lire, suscite des efforts aussi pénibles qu'improductifs pour ceux qui veulent écrire.
  • L'écriture auvergnate note cependant certaines consonnes finales dans un cadre grammatical parfaitement clair et facile à assimiler :
distinction des personnes du verbe : P2 :-s; P4 : -m; P5 : -z; P6 : -n.
distinction d'homonymes, presque tous monosyllabiques : cand : quand; cant : combien.
mots où la consonne disparue reparaît au féminin : chantàd : chanté, féminin chantadà. Mais elle met cette consonne entre parenthèses lorsque les habitudes françaises de lecture risquent de la faire prononcer à tort : bou(n) : bon, fuo(rt) : fort.
L'écriture ne sépare pas -ss en fin de ligne : ra-ssà : race. Elles ne redouble que les consonnes, notamment nasales, qui jouent un rôle effectif dans la prononciation : fennà : femme [fin-no], sannâ : saigner [san-nâ]; ainsi que le s entre voyelle, l'expérience ayant montré qu'autrement les lecteurs tendent à prononcer (z).  
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