Lexique identitaire

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ECRIT EN AUVERGNAT : PERIODISATION ET GEOGRAPHIE

"Le patois ne peut pas s'écrire" est un axiome de nombreux patoisants. Ne connaissant que les conventions françaises et sachant la prononciation auvergnate fort différente, ils n'imaginent pas que comme pour toute langue il suffit d'établir un rapport clair et constant entre la parole et les conventions adoptées (V. Ecriture et graphie). Or, de Chaduc (Riomois, auteur de Noëls) et Pezant (Clermontois) tous deux du XVI° siècle à maintenant, plus de 75 écrivains ont écrit des dizaines de milliers de pages en notre langue, notre époque étant une des plus fécondes : les arvernisants, hantés par la crainte de la disparition de la langue, veulent témoigner. La littérature troubadouresque et administrative du moyen âge n'était pas en auvergnat, mais dans une scripta d'origine méridionale (languedocienne et non limousine comme on l'a affirmé longtemps). Elle ne saurait constituer un modèle ni de langue ni de graphie pour l'Auvergne où elle n'est pas du tout comprise. La substitution du français ("langue vulgaire" comme l'auvergnat) au latin, le développement d'écoles urbaines et campagnardes à partir de 1550, l'apparition de l'imprimerie (Thiers 1518, Clermont 1523) ont permis aux Auvergnats de comprendre que leur langue pouvait s'écrire. Au XVII° siècle (jusqu'à 1711) Clermont et Montferrand sont les deux centres actifs de l'écrit en langue auvergnate. Secondairement Riom, Montluçon, le Velay, Ambert ont des écrivains. Après une période creuse (1711-1757) à cause de la francisation des hautes classes bourgeoises, instruites dans les collèges d'Oratoriens et de Jésuites, des petits bourgeois prennent le relais : Clet (au Puy), Faucon (à Riom), Sanitas (à Clermont). De 1815 à 1875, la production écrite se développe, se diversifie (prose à côté des vers), s'étend géographiquement : la région métropolitaine clermontoise (de la haute Combraille aux Limagnes) reste prépondérante, mais l'écrit gagne le pays gannatois, Vichy, l'Yssingelais, la région du Puy, le Sanflorain. A la fin du XIX° siècle, la politique de francisation brutale refoule l'écrit auvergnat vers les secteurs ruraux et périphériques : Brivadois, massifs de l'Est de la Basse-Auvergne, Yssingelais, Montluçonnais, Vichiat. De 1920 à 1970, une maniaquerie archaïsante tend à travestir la langue sous un vêtement graphique inadapté et des formes linguistiques mensongères apparaissent (comme l'article lou à la place de le dans la Basse-Auvergne). Le prestige de l'auvergnat, pourtant encore largement parlé, est au plu bas. Il souffre des illusions sur les "modèles" méridionaux de la "langue d'oc". Après 1970, sous l'impulsion du Cercle Terre d'Auvergne, l'écrit auvergnat retrouve des serviteurs actifs dans les classes instruites des villes. . Il s'agit cependant en général de gens ayant des racines rurales et des points d'attache dans les parlers réels. Ceux-ci, affaiblis par la pression française, sont cependant enrichis par l'ALEP, indispensable aux ambitions littéraires nouvelles des auteurs actuels.
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