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FRANCE et PARIS
C'est une question qui touche de près les "provinciaux profonds" que sont les Auvergnats. Car notre région a plus souffert que d'autres de "la France que Paris fit" du fait de ses handicaps naturels qui renforçaient les méfaits du centralisme excessif. Mais, clairement ou confusément, les Auvergnats ont toujours compris que la "France" en tant que réalité substantielle dépasse de loin cette interprétation imposée par les pouvoirs parisiens depuis un millénaire.
Et de fait, géohistoriquement, la France fut précédée par la Gaule qui était une unité consciente de civilisation malgré les divisions politiques. Le territoire était le même pour l'essentiel. Et avant la Gaule, plusieurs civilisations préhistoriques, plusieurs courants de peuplement avaient déjà tendu à recouvrir le plus clair de cet espace. D'autre part, même si la théorie des "frontières naturelles" a été une systématisation abusive, toute personne de bonne foi ne peut nier que l'étendue de la Gaule - France a été circonscrite clairement - d'une manière approximative, bien entendu, laissant la place à des variations marginales - par une disposition géographique d'ensemble: elle facilitait les conjonctions internes et possédait des bornes naturelles qui furent reconnues sans ambages dès l'Antiquité. Même si, pour l'instant, l'avenir semble à une certaine confusion, il est inévitable qu'une configuration aussi bien dessinée (c'était déjà le verdict de Strabon) et aussi constante reparaisse sous une forme ou sous une autre. Il n'est donc pas vain de se poser des questions sur la ou lesdites forme(s) et il est indispensable de comprendre qu'elles ne pourront pas se passer d'intégrer des éléments (géographie, histoire, civilisation) longuement avalisés par le passé: parmi eux, l'Auvergne et la France médiane où notre région s'inscrit.
D'autre part, la position - charnière de l'Auvergne en a toujours fait une partie prenante des évolutions du reste de la France. Par exemple, l'émigration auvergnate, massive et prolongée, s'est répandue sur presque toute l'étendue du pays, de la Lorraine, de la Champagne et de la Normandie à la Provence, de l'Atlantique aux Alpes (et un peu au-delà), du Bordelais et des Landes au Jura. Il est donc évident que l'Auvergne est la région "française par excellence" et ne saurait être enfermée dans un ghetto du genre Terre d'oc / "Occitanie".
Quant à Paris, il ne faut pas oublier que son rôle fut longtemps "globalement positif": à la tête d'un conglomérat économique politique et culturel puissant appuyé sur les richesses du Bassin Parisien, il a élevé la France au rang de grand Etat, assez riche pour donner à ses citoyens un des niveaux de vie et de culture parmi les plus élevés du monde. Actuellement encore, son rôle économique reste très utile et nous avons bien besoin parfois que la compétence de hauts fonctionnaires nous protège contre certaines incohérences d'un "régionalisation" sur laquelle il y aurait à dire. Cependant, ce rôle de Paris est devenu en partie négatif avec les erreurs du XVII° siècle (guerres épuisantes pour un domination impossible de l'Europe), du XVIII° siècle surtout (destin colonial manqué consacrant la primauté anglo-saxonne, incapacité de la monarchie à se réformer, d'où les massacres de la Révolution et de l'Empire entraînant le déclin démographique et une cassure dans la société française aussi déplorable que facile à entretenir par les intrigues intéressées de la politique et de l'intelligentsia). Puis le XIX° siècle déséquilibra la France en organisant l'hypertrophie de sa capitale. Suite à cet affaiblissement du tissu géographique français, l'intelligentsia parisienne a pris une place excessive, doctrinaire et irréaliste, dans le destin de la France. Celle-ci, si elle veut survivre - ce qui serait au profit objectif de tous, à l'intérieur et à l'extérieur - ferait bien de secouer ce joug vain et alcibiadesque et de se retremper dans l'atmosphère des provinces et des régions au lieu de contribuer à y répandre les miasmes des microcosmes parisiens (qu'il ne faut pas confondre avec le peuple vivant à Paris, lequel n'aspire souvent qu'à retrouver sa province d'origine).