GUILLAUMIN (Emile)
Né (1873) et mort (1951) à Ygrande, auteur d'une trentaine de livres (détaillés dans Malleret M. : Encyclopédie des auteurs du pays montluçonnais et de leurs oeuvres de 1440 à 1994, éditions des Cahiers Bourbonnais, Charroux 1994) et de plus de 900 articles, pionnier du syndicalisme paysan, il est surtout connu par La vie d'un simple, qui eut 9 éditions depuis 1904 et qui est devenu le livre emblématique du Bourbonnais, tant la question du métayage, des tensions sociales qu'il suscita parfois et la cristallisation des positions politiques et idéologiques autour de lui a été portée au premier plan de la vie de la province au XIX° siècle et dans les premières décennies du XX°.
Emile Guillaumin était un lutteur convaincu mais modéré quoique son oeuvre ait été largement utilisée par plus intransigeant que lui. Elle a donc une valeur documentaire sur la question paysanne et sur les courants qui la traversaient. Littérairement, Guillaumin n'est pas un styliste, mais la sobriété de son écriture est adaptée aux sujets traités et ne manque pas de force de conviction.
Mais on ferait peut-être bien de reprendre son oeuvre dans son ensemble en tenant compte de la chronologie et en distinguant bien les ouvrages militants des autres. Car, notamment, la vie de Tiennon Bertin (La vie d'un Simple) n'est pas seulement le récit émouvant dans son dépouillement d'une existence de métayer qui se veut typique, des vexations et injustices subies dans la dignité, c'est aussi l'épopée de la transformation de la campagne bourbonnaise - agriculture et paysage, vie quotidienne et comportements - pendant le XIX° siècle, époque où l'on passe d'un pays de landes et de maigres champs sans chemins au Bocage harmonieux cher aux coeurs bourbonnais. C'est pourquoi La vie d'un simple est appréciée même de ceux qui sont réticents sur l'idéologie sous-jacente, pensant que cette transformation remarquable n'eût pu se faire sans l'action et les capitaux des grands propriétaires, mais qui doivent admettre sa force identificatrice. Cela lui donne aussi un intérêt qui dépasse de très loin le cadre et les problèmes du Bourbonnais.