LANGUE
C'est le langage commun à une société, une "nation" disait-on avant la Révolution. On tend souvent à réduire le sens du mot en édictant que la langue suppose une grammaire normalisée, un usage littéraire unifié, une tendance à l'unité de ses différents niveaux. Cependant cela ne tient pas puisqu'on considère le basque et le breton comme des langues alors qu'ils ne sont pas plus unifiés et ne font pas plus l'objet d'un usage commun que l'auvergnat : il semble qu'ici on fait entrer en ligne de compte le critère d'étrangeté. Cependant, malgré son appartenance au groupe gallo-roman des langues néo-latines, l'auvergnat est en fait tout aussi imperméable au francophone ou au ressortissant des langues d'oc méridionales que tout autre langage (voir Intercompréhension).
Les arvernisants parlent de langue auvergnate en reconnaissant des particularités phonétiques, morphologiques et lexicales irréductibles et non partagées (de façon étendue et cohérente) à notre idiome. Ils admettent que c'est une langue dialectalisée, c-à-d divisée en dialectes non hiérarchisés. Ils pratiquent et encouragent les diverses formes de la langue et cherchent à frayer les voies d'une conception sans norme niveleuse. Cependant, il faut quelques principes. Depuis l'abbé Tailhandier (XVIII° siècle) il existe chez tous ceux qui ont réfléchi sur la nature et le destin de la langue une aspiration à une unité souple et à une hiérarchisation en faveur des traits les plus originaux et les plus typiques (voir aussi avernat, Ravel, Cercle Terre d'Auvergne). Outre les obstacles extérieurs (pression du centralisme parisien, tentatives de subordination au provençal par des Félibres comme J. Ronjat, au languedocien par les occitanistes) il a manqué la continuité dans l'effort et la volonté de faire face aux dérisions des dépréciateurs et aux intimidations des faux savants. Cette volonté existe maintenant, quoique un peu tard, chez les arvernisants groupés autour du Cercle Terre d'Auvergne et d'autre part les nécessités de la pratique pédagogique et littéraire inspirent le développement quasi-spontané et prudent de l'ALEP, auvergnat littéraire et pédagogique qui respecte les grandes caractéristiques identitaires de chaque zone dialectale tout en rejetant les vétilles qui séparent sans rien apporter et tout en procédant à un rapprochement par enrichissement au moyen de l'emprunt lexical phonétiquement compatible. Cet enrichissement se fait notamment en développant les modes les plus répandus et les plus typiques de formation des mots (puisque l'évolution du monde confronte toute langue avec la nécessité de nommer des notions nouvelles) et en privilégiant les idiomatismes où l'originalité de l'auvergnat donne toute sa mesure.